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Coming out scolaire

«Là maman appelle la direction, de toute façon si tu ne le fais pas ils vont t'appeler parce que j'ai mis mon nouveau nom partout »


Le coming out scolaire c'est aussi, pour Maël, le début de la transition sociale. Lorsqu'il fait son coming out scolaire, il demande à tous de respecter son identité de genre et prend le parti de l'expliquer lui même à ses camarades de classe.


C'est une étape importante qui n'est pas laissée aux fruits du hasard. Bien que Maël avait déjà, à ce moment, fait des coming out à ses ami.e.s proches, ce n'est pas toute la classe qui était au courant de son identité et qui connaissait son prénom choisit*.


La première étape à d'ailleurs été, pour lui, de s'autoriser à utiliser son prénom choisit en contexte scolaire. Il a donc commencé par signer certains travaux de son nouveau prénom, Maël, d'abord dans les cours où il se sentait en confiance avec l'enseignant.e, ce qui a tôt fait de propulser la rencontre avec la direction de son niveau pour ajuster l'ensemble de son dossier scolaire à sa nouvelle réalité.


Comme parent, je craignais la réception qui serait faite à nos demandes. Plusieurs parents pairs aidants racontent avoir dû se battre pour que le changement de prénom et de genre soit fait à l'école. Plusieurs personnes trans ont aussi témoigné des difficultés à obtenir le support administratif nécessaire pour que leur dossier soit ajusté en fonction de leur identité de genre et de leur nouveau prénom. Je craignais donc que nous soyons victimes des mêmes problèmes logistiques qui causent de la discrimination.


Pour aider Maël à s'affirmer face aux décisions prises par la direction de niveau et pour nous assurer que ses droits soient respectés, j'avais écrit une lettre qui reprenait nos demandes et qui faisait appel au sens du devoir, de l'école, à les respecter.


Nous ne nous rendions pas au bureau de la direction pour négocier l'identité de genre de Maël. Nous nous rendions à cette rencontre pour savoir de quelle manière l'école comptait s'y prendre pour respecter son nouveau prénom, ses pronoms et son identité de genre. De quelle manière l'école allait supporter Maël dans sa transition et de quelle manière ses camarades de classes allaient être mis au courant de sa transition.


D'un côté j'avais mon conjoint qui réalisait tranquillement que son fils faisait une transition et de l'autre j'avais cet enfant qui me poussait littéralement dans le cul pour faire avancer les choses parce qu'il y avait urgence : urgence de se sentir enfin lui-même dans toutes les sphères de sa vie et d'en finir avec ce masque de plomb d'une lourdeur accablante qu'il portait depuis si longtemps.


Je ne pouvais pas compter sur mon mari à ce moment précis. J'étais le facteur de changement, j'étais celle qui avait le pouvoir de faire bouger les choses. Parce qu'il faut savoir que tant que l'enfant n'a pas atteint ses 14 ans, il est totalement dépendant de son adulte responsable.


Je n'ai rien négocié avec lui, je ne lui ai pas demandé d'attendre, je n'ai pas remis à plus tard la rencontre avec la direction pour gagner du temps, je n'ai pas tenté de le dissuader et d'attendre la fin de l'année scolaire pour qu'il fasse cette transition pendant l'été avant le retour en classe. J'ai obtempéré. J'ai pris conscience, à ce moment précis que je n'avais pas les qualifications requises pour questionner ses demandes et que si les experts s'entendent sur une chose c'est bel et bien l'importance du support parental dans la vie des enfants trans. Pour me rassurer je me disais qu'au pire il changerait à nouveau de prénom et de pronoms au besoin. Rien n'est coulé dans le béton et nous sommes en constante évolution aussi bien prendre la vague pendant qu'elle passe.


J'ai été à cette rencontre plus confiante que jamais parce que j'ai la conviction profonde qu'en accompagnant Maël pour qu'il soit enfin lui-même au grand jour je participe à déjouer les statistiques accablantes entourant l'espérance de vie des personnes trans.


Nous avons été accueillis chaleureusement par la psychologue de l'école et la directrice de niveau. Elles avaient déjà un plan, qu'elles ont présenté à Maël. Son nom allait être changé sur l'ensemble des listes et il y aurait une tournée des classes que Maël fréquentait pour informer les gens de sa transition, de ses nouveaux pronoms d'usage et de son prénom choisit.


Maël a dit qu'il voulait être présent et lui-même répondre aux questions des élèves. C'est ainsi que les choses se sont faites. Accompagné de la psychologue et de son tuteur, il a fait le tour de toutes ses classes et parlé de trans identité, présenté le bonhomme gingenre et répondu aux questions.


J'en parle avec lui dans cet entretient.


Allo Maël


Allo maman


Est-ce que tu acceptes qu'on parle de ton coming out à l'école


Oui pas de problème


Est-ce que tu t'en souviens de la rencontre avec la direction, le 4 février 2018


Oui, je me souviens de la rencontre avec la direction du secondaire 2, dans le fond c'était pour faire mon changement de nom juste à l'école en attendant que mon changement de nom légal se fasse. Puis trouver une manière de prévenir mes profs et les autres élèves qui étaient dans mes classes pour qu'ils utilisent mon bon nom et les bons pronoms aussi.


Donc, en demandant que ton nom soit changé à l'école pour ton prénom choisit et pour que tes pronoms soient respectés il fallait que tu fasses un coming out. Il n'y avait pas d'autres possibilités parce que tu étais en transition sociale, tu passais d'un genre avec des pronoms et un prénom attribués à ce genre là, à un autre genre, où là, tout changeait. As tu senti ça forcé comme coming out ?


Moi je ne l'ai pas senti forcé parce que c'était quelque chose que j'avais besoin de faire, si justement, je voulais être respecté. Oui, dans un sens c'était forcé, mais ça me rapportait quelque chose, donc ce n'était pas mauvais.


Te sentais tu en danger de faire un coming out à l'école en secondaire 2 ?


En secondaire 2, pas du tout, je connaissais ma classe, c'était beaucoup de gens de robotique et de musique. C'était une classe où j'avais des amis, alors, non, je ne me sentais pas en danger.


Qui t'accompagnait quand tu as fait ton coming out ?


Mon professeur de robotique qui est mon tuteur, toi, papa, toute la famille. Tu m'as accompagné à l'école et papa m'a accompagné de manière indirecte avec le CÉ.


L'implication qu'on a eu en parlant à la direction, en s'assurant que tout allait bien se passer, tu t'es senti accompagné là-dedans, tu ne t'es pas senti jeté la tête la première dans la fosse du lion ?


Eh, non !


Comment ça c'est passé dans les classes ?


Les profs étaient plus stressés que moi ! Je ne sais vraiment pas ce qui les stressait autant. Probablement la réaction des autres élèves. J'étais aussi stressé à cause de la réaction des autres élèves mais tous les élèves de robotique étaient déjà au courant, parce que mes amis plus vieux, de secondaire 4, utilisaient déjà les bons pronoms et le bon prénom, il restait juste le reste de ma classe à mettre au courant.


Ça a été passablement facile. Ce n'est pas quelque chose qui me dérange de répondre aux questions alors les autres élèves pouvaient poser des questions, mais les profs étaient stressés des question que les autres élèves allaient poser.


Quelles questions est-ce que les gens posent habituellement quand tu annonces que tu es une personne trans. Est-ce qu'il y a des questions inconfortables qui te sont posées directement ?


C'est jamais arrivé à part la petite sœur d'une amie qui a 7 ans qui me demande si je vais avoir un pénis quand je vais être plus vieux. Mais tu sais, elle est toute petite et elle ne comprend pas nécessairement. Mais sinon les gens sont respectueux et il ne posent pas tant de questions.


La sensibilisation qui se fait via des personnes comme Kathe Lessard ou d'autre personnalités qui s'affichent en tant que personnes trans et qui ont plus de visibilité considères tu que ça fonctionne ?


Ça fonctionne très bien ! Bon, tout le monde à ses imbéciles, mais ça aide à démystifier certaines réalités trans.


Si on revient à ton coming out, donc tu t'es présenté dans ta classe qu'est-ce que la psychologue qui t'accompagnait et ton professeur ont dit ? Comment ils ont présentés ça ?


Ce qu'ils ont fait c'est qu'ils ont présenté la personne gingenre. Dans le fond, la personne gingenre, c'est juste un petit bonhomme en pain d'épice avec une échelle pour l'identité de genre, l'expression de genre, l'orientation sexuelle et romantique. C'est cette échelle qui varie entre les deux extrêmes de chacune de ces chartes là.


C'est ce qu'on appelle le modèle binaire, d'un côté tu as les hommes à l'opposé de ça, tu as les femmes.


D'un côté tu as hétérosexuel et à l'opposé de ça tu as homosexuel, ça devrait être asexuel mais bon «les gens». Tu as l'expression de genre féminine et l'expression de genre masculine. Tu as... en tout les cas, vous voyez le genre !


C'est vrai en fait, hétérosexuel puis homosexuel à l'opposé, il y a tellement de choses qui existent, faudrait le réviser ce petit bout là.


[N.D.R.] La personne gingenre a été mis à jour et présente actuellement des échelles différentes pour l'identité de genre féminine et masculine ainsi que pour tous les autres paramètres passant de «l'absence de» à féminin ou masculin.





Il faudrait le réviser, mais les gens ne sont vraiment pas prêts pour ça, ils ne comprennent même pas que l'homosexualité ce n'est pas créé par un dérèglement des hormones !


Ok wow !


Histoire vécue d'ailleurs.


Histoire vécue , on t'a dit ça ?


Petite anecdote, en classe de sciences il y a deux ans donc eh... Non ! L'année passée ! En secondaire 3 on parle des hormones dans le corps humain. La prof explique qu'il y a certaines personnes assignées garçons à la naissance qui ont un taux plus élevé d'œstrogène et il y a un élève qui fait : Ah! c'est pour ça qu'ils sont gais !(rires, face palm)


C'est intéressant que tu amènes ça parce que c'est un argument biologique qui a déjà existé, c'est pour ça qu'on disait que les gais étaient plus efféminés par exemple. C'est intéressant qu'en 2020 un étudiant de secondaire 3 ait exactement le même raisonnement qui a déjà servi à justifier des thérapies de conversions.


Tu dis que c'est intéressant mais moi je dis que c'est désespérant !


Ce qui est intéressant c'est de voir que cette logique là existe encore malgré tout ce qu'on essaie de faire pour prévenir la discrimination et déboulonner les mythes. As tu eu des questions dans tes classes quand tu as fait ton coming out ?


J'ai eu beaucoup plus de questions en lien avec mon orientation sexuelle qu'avec mon identité de genre.


Les gens pensent que vu que tu es non binaire que tu es bi-sexuel ?


Oui bisexuel, mais à l'époque c'est comme ça que je m'identifiais aussi, donc ma réponse était oui. Ma réponse n'est plus comme ça aujourd'hui. Aujourd'hui je suis... c'est vraiment difficile à définir parce qu'en tant que personne non-binaire, je ne peux pas être «homosexuel», mais je suis attiré envers les garçons.


Mais tu te considères comme trans masculin ?


Je me considère comme trans masculin non binaire.


C'est quoi non binaire ?


Je ne considère pas que mon identité de genre est dans la binarité. Je vais m'identifier plus masculin parce que c'est plus évident dans une société qui est très binaire, qui est très genrée, mais je ne considère pas entrer dans la binarité même du coté masculin. C'est comme le pie chart. Une tarte. Le diagramme qui est en rond, tu as masculin, tu as féminin, tu as autre et quand tu te place au milieu ça donne gender fluid et moi je serais dans «autre masculin».


J'avais trouvé une très belle image au lieu d'une charte avec un curseur qui se déplace dans la binarité de gauche à droite, ce sont de petits nuages colorés et ça se situait dans ça, au centre eux ils mettaient agenre.


Oui, je suis très d'accord !

Donc tu as eu plus de questions sur ton orientation sexuelle que sur ton identité de genre. Sans dire que c'est une preuve, c'est quand même un indice que les gens mélangent encore les deux choses (orientation sexuelle et identité de genre).


Oui, c'est très clair que les gens mélangent les deux choses.


Puis est-ce que les profs mélangent les deux choses ? Ton tuteur qui t'accompagnait et la psychologue mélangeaient-t-ils les choses aussi ou s'ils faisaient la part des choses ?


Ils semblaient faire la part des choses, disons que je les ai aidé mais ils semblaient passablement faire la différence.


Une fois que ça a été fait ton coming out, est-ce qu'il y a eu des changements de la part des gens dans tes classes par rapport à toi ?


Non les élèves ont continués de me traiter de la même manière.


De t'envoyer promener en te traitant de p'tit bout de cul (rires) ?


Ah non ! Les gens sont très respectueux ! (rires) Il y a juste robotique qui n'avait plus besoin de dire : «Les gars et Maël !»


«Les gars et Maël» (rires), effectivement ça a comme réglé le «problème» c'est devenu juste : «Les gars !» Par rapport à ça, tu t'es retrouvé à changer de catégorie dans plusieurs cours parce qu'il y a encore cette binarité là. Ça se passe comment ?


En secondaire 2 ça c'est très bien passé. Étant donné que je n'avais pas fait de changements légaux nul part, j'avais encore accès aux vestiaires de mon choix, même chose pour les toilettes. En secondaire 3 ça a été un peu plus difficile, parce que je n'avais plus nécessairement accès aux vestiaires des filles où j'avais été toute ma vie, et le vestiaire des gars me mettait raisonnablement inconfortable, mais c'était quand même l'option la plus confortable que j'avais parce que tu peux toujours te trouver un coin discret où tu peux te changer.


Et c'est là que la saga des toilettes a commencé, mais c'est une histoire qu'on garde pour plus tard. Est ce que tu peux dire qu'en parlant du coming out scolaire on a fait le tour de tes différents coming out ? Est-ce que tu considères, par exemple que tes coming out au personnel de la santé ce sont des coming out ou si c'est autre chose ?


Ça dépend de quel spécialiste de la santé tu parles, admettons que je doive faire un coming out au médecin de famille pour qu'il puisse me soigner correctement physiquement, je considère que c'est un coming out. Mais je n'ai pas besoin de faire un coming out à mon endocrinologue parce c'est son travail. Si le travail des personnes n'est pas directement lié aux enfants trans et créatifs dans le genre, donc oui, je considère ça un coming out, parce que j'ai besoin de me outer pour avoir un service qui est normal pour une personne cis.


Tu n'as pas le choix. C'est fatigant, tu es tout le temps en train de faire des coming out.


C'est chiant. Oui et pas par choix, par obligation, pour avoir un service de base. Pour avoir du respect de base.


Aurais-tu une solution pour que ça arrête d'être tout le temps présent cette problématique là ?


Il faut tout dégenrer. Il faut que «ne pas connaitre le genre de la personne» devienne la norme et devienne plus important.


Que ça devienne comme un réflexe, que peu importe si la personne en face de toi a une barbe ou des seins que ça ne devienne plus un indice pour identifier le genre de la personne ?


Tu n'assumes pas le genre de la personne jusqu'à ce qu'elle te le dise elle même, et il faut que ça devienne la norme peu importe quoi. À ce moment là on va arrêter d'avoir des problèmes, ça va être long mais on va arrêter d'avoir des problèmes.


Tu es d'accord avec ton grand-père quand il dit que la véritable révolution sexuelle va se faire le jour où le genre va mourir ?


Quand tu n'as plus de genre tu n'as plus besoin de te poser ces questions là. Le jour où tu n'as plus de genre tu n'as plus de normes de genre non plus. Le jour où tu n'as plus de genre, le jour où tu arrêtes d'assumer les genres des personnes que tu rencontres et de pousser les genres, le jour où ne pas savoir le genre de la personne devient la norme, socialement tu n'as plus...


Et bien, tu n'as plus de feu en Californie ! (rires)


Ça serait vraiment great ! C'est sur que, comme pour la covid en ce moment, tu vas toujours avoir du monde qui vont refuser de s'y conformer, donc tu risques d'avoir encore des feux en Californie. Mais ce que je voulais dire, c'est qu'ils ne pourront plus pousser les stéréotypes féminins et masculins. Malheureusement le problème qui va venir avec ça c'est ce qui est appelé, dans la communauté, l'hyper androgynéité. Tu es très, très androgyne et tu n'as pas le choix de correspondre à ça pour être considéré comme valide, c'est le cas pour les personnes non-binaires entre autre. C'est le risque qui va avec. La mode va pousser tout le monde à être androgyne. Ce qui n'est pas nécessairement ce que l'on veut.

Si on efface le genre partout socialement et qu'il n'y a plus de jugements ou de critiques liés au genre, les personnes masculines qui veulent porter des tops bedaine vont pouvoir le faire aussi. La publicité de produits de beautés, par exemple, ne sera plus nécessairement directement adressée aux filles. On n'est pas rendu là, c'est certain, je ne verrai pas ça de mon vivant !


On va cibler autre chose que le genre j'ai l'impression. Ça fait tellement longtemps qu'on est habitué de classer les choses. Il y a les classes sociales, il y a les classes de genres, c'est infini, c'est tout le temps la même chose : qualifier les individus pour les mettre dans des petites cases. Il faudrait changer notre approche. On n'est pas rendu là, tu vas être encore obligé de faire des coming out probablement.


Ouin...


Présentement, te sens tu en «break» de coming out, sens-tu que ça te joue un tour cette année de ne pas faire de coming out ?


Ça me joue un peu un tour cette année.


Tu n'as pas envie de refaire un coming out scolaire ?


Non, je n'ai pas d'énergie à mettre là-dedans. C'est certain que le monde me traite comme un œuf cru là, mais...


Qu'est-ce que tu veux dire ?


They handle me like a raw egg... Un Å“uf cru c'est fragile, pas comme un Å“uf cuit dur.


J'adore : «Ils me traitent comme un œuf cru.» C'est bien comme expression. Ils marchent sur des œufs finalement. En même temps tu as des réactions positives depuis le début de l'année, il y a un étudiant qui t'a demandé : «What's your gender ?» et...


Je ne sais pas si c'était une blague, mais c'était très apprécié. Il n'y avait vraiment pas d'agressivité. C'était comme :


- Hey ! What's your gender ?


- I don't have one.


- Oh, that's nice !


L'interaction c'est finie là.


Penses tu qu'il y a des étudiants qui te regardent et qui se disent : «Wow ! J'aimerais ça être capable de m'afficher et de m'affirmer comme ça !» Crois tu que tu es un modèle des fois ?

Je ne le sais pas, et je vais être honnête, je n'ai vraiment pas envie de le savoir. Ça me mettrait de la pression, je ne suis pas quelqu'un qui aime ça leader les choses. Je suis juste moi et je ne veux pas que ce soit reconnu comme étant quelque chose d'exceptionnelle même si c'est reconnu comme étant quelque chose d'exceptionnel, parce qu'il y a très peu de gens qui sont «eux-mêmes» sans compromis.


Il y a des gens qui font leur coming out juste à eux-mêmes, c'est compliqué d'assumer une identité non-binaire parce qu'il n'y a rien qui est fait pour les personnes non-binaire, nul part.


Chhuuuuut ! Parle moi s'en pas !


Tu dirais sur une note de 0 à 10 ça c'est passé comment ton coming out à l'école ?


Je dirais un 8


8, c'était bien ?


Ah, c'était bien ! C'était stressant, mais c'était bien.


Tu as fait ça sur deux jours ou trois jours, te souviens tu ?


Deux jours de coming out à deux groupes différentes, une fin de semaine de repos puis un troisième jour au plus âgés du groupe de robotique.


Habituellement l'école insiste pour que ça ne se fasse fait pas au milieu de l'année scolaire, on fait ça pendant l'été. Même la psychologue en avait glissé un mot. (rires)


Chhuuuut ! Ça, vous faites ça quand vous voulez ! Écoutez pas les psy ! (rires)


Tu disais «Tant pis on est au mois de février, je fais mon coming out maintenant !» Tu étais rendu là, vraiment.


Oui


Tu as trouvé ça comment de faire ça au milieu de l'année ?


Je n'ai pas eu de trouble, mais le monde était tout mêlé par contre !


Qui était mêlé ?


Ceux qui étaient le plus mêlés c'était la gang de robotique. Tu sais, la robotique c'est littéralement une petite famille, tout le monde se soutient, tout le monde se connaît et tout le monde se protège, tout le monde se tient. Ils ne se le diront pas parce que ce sont des gars et qu'ils ont trop d'orgueil pour se le dire, mais tout le monde s'aime ! Maudite gang de caves ! Désolé, il fallait que je le dise ! Je les aime comme ça !


J'étais la fille du groupe, ils me protégeaient et ils m'aimaient. J'étais comme la petite sœur et la grande sœur en même temps, et j'étais définitivement la maman du groupe : trousse de premiers soins (jazz hands) ! Mon coming out ça a changé du tout au tout. C'est certain qu'ils ont été les plus vite à s'adapter mais, le monde qui me connaissait moins en robotique ont pris plus de temps parce qu'ils me parlaient moins et ils me voyaient moins donc ils étaient plus mêlés. Mon coming out à mon prof de robotique ce n'est même pas moi qui l'ai fait.


Tu t'es fait outer ?


Tellement par accident !


Ce n'était pas un outing¸ il te défendait ?


Dans le fond c'est mon meilleur ami, je l'appelle mon grand frère. Je lui avais déjà fait mon coming out. On a des soirées de travail en robotique, ma soirée était finie, lui discutait avec notre tuteur, notre prof de robotique. Après mon départ, mon prof de robotique utilise mon morinom** et mon ami qui le corrige : «Non ! C'est Maël maintenant.» Mais mon prof de robotique n'était pas encore au courant. Donc mon meilleur ami lui a expliqué. Puis il me texte, il se confond en excuses, il me dit : «Je suis vraiment désolé, je pense que j'ai fait une connerie. Je t'ai outé au prof de robotique !» Je lui ai dit : «Mon dieu merci ! Je ne savais pas comment le faire !» Je pense que je n'ai jamais vu un texto qui contenait autant de soulagement hashtagtextohypersoulagé.


Dans le fond il a voulu te défendre, il était un peu fâché ?


Je pense qu'il était plus surpris que fâché parce qu'il pensait que je l'avais déjà dit à notre tuteur.


Il était comme : «De quoi tu parles ? C'est Maël !»


Tuteur : «De quoi TU parles ?»


Meilleur ami : «Oups !»


Toi tu étais super soulagé parce que tu ne savais pas comment le dire. On ne te poussait pas, on t'a laissé faire, on ne t'a pas pris la main pour te dire tu fais ton coming out à ton tuteur.


Non, je faisais ça à mon rythme.


Exactement ! À ton rythme. C'est toi qui nous disait quoi faire au fond.


C'est ça !


C'est toi qui m'a dit : «Là maman appelle la direction, de toute façon si tu ne le fais pas ils vont t'appeler parce que j'ai mis mon nouveau nom partout (rires).» À l'âge que tu avais ils n'avaient pas le choix de m'informer parce que tu avais juste 13 ans.


C'est vrai, j'avais juste 13 ans ! J'étais encore un bébé ! It is what it is !


Autre chose à ajouter ?


Non.


Merci !


De rien !


Maël préfère être en contrôle de ses coming out. Il décide lui-même de laisser savoir aux autres qu'il s'identifie différemment du genre qui lui a été attribué à la naissance. Il exige que ses droits soient respectés et il ne cherche qu'à être lui-même.


En expliquant au différents groupes le schéma de la personne gingenre, les adultes alliés de Maël, on prit le temps d'expliquer la notion de genre et d'orientation sexuelle et de les distinguer.


Bien qu'en opposant le genre «agenre» au genre féminin ou masculin et l'asexualité à l'attirance sexuelle pour le féminin ou le masculin ce schéma ne tienne pas compte de certains aspects dont la non-binarité et la pansexualité par exemple, il a permis à Maël d'expliquer son ressenti et de faire son coming out à ses camarades de classe dans un vocabulaire commun lui permettant d'être entendu et écouté.



* Prénom choisit : Prénom choisi par la personne qu'il désigne. On y oppose souvent le prénom donné à la naissance qui deviendra le morinom ou deadname.


**Morinom ou deadname : Prénom donné à la naissance et dont la personne ne désire plus faire usage.

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